Le temps c'est de l'argent ?

Porte Drapeau - Yvan Finally

J'ai apprécié ce livre pour plusieurs raisons, dont certaines qui n'ont strictement rien à voir avec la thématique du livre. Et pour éviter le moindre spoil, c'est de ça dont je vais vous parler ici.

Déjà, l'auteur est une personne que je considère comme un ami. Ce n'est pas un titre que je distribue à la légère. L'engouement que j'ai eu à l'annonce de la sortie de son livre est lié à des dizaines de soirées passées à discuter du monde et de cette passion. Avoir une personne qui partage le plaisir d'écrire qui vient régulièrement boire des verres dans le bar où je travaillais à l'époque, c'était une de mes bouffées d'air. Le fait qu'il concrétise ses envies m'a énormément touché. Moi qui ne suis qu'à un essai de quelques pages produit sur Wattpad sans grandes convictions. Même si cet écrit a changé ma vie à lui tout seul, on est loin du courage nécessaire pour financer sa propre édition d'un roman concret.


Ce livre m'a étonné par son sujet et son approche. Yvan était un journaliste. Pour moi, il l'est toujours, même s'il ne produit plus d'articles pour la gazette du coin, ce qui n'est pas plus mal en fait. Mais son approche "journalistique" est identifiable et j'ai pu me projeter sur sa dynamique d'écriture dès les premières lignes.

Ce qui est intéressant quand on lit un roman produit par une personne que l'on connait un minimum, c'est de chercher les pointes d'humour qui appartiennent également au monde réel, les intonations et les actions des personnages qui font un peu ce qu'on sait que l'écrivain aurait fait ou dit dans la vraie vie, dans la même situation.


Alors oui, j'ai reconnu l'ami, le journaliste, mais j'ai surtout découvert l'écrivain. Sa capacité à produire un roman complet d'actions qui ne le concerne pas de tout près. Même s'il aime la natation, on ne peut pas dire qu'il soit proche d'un record olympique, pourtant, il en parle comme s'il l'avait vécu et d'une certaine manière, c'est sa sensibilité de journaliste qui l'a rapproché du monde sportif et qui a étoffé ses connaissances dans différents domaines. Au même titre que je le soupçonne d'avoir interviewé une paire de sportifs et d'avoir fait un sérieux travail de recherche, je ne serais pas étonné de le voir produire un roman sur la Formule 1 un jour, pas besoin de vous dire qu'il n'en aura jamais conduit, mais nul doute qu'il saura restituer le moindre virage du Nürburgring avec les mots adéquats.


Pour revenir au livre, Yvan m'a plongé dans l'histoire et j'ai fini par oublier qu'il était l'écrivain. Je me suis attaché à ses personnages, tous utiles à l'histoire. Avec l'habileté d'un romancier aguerri, il a su donner une âme à chacun, les utiliser à bon escient, poser des actions pour les récupérer quelques chapitres plus loin et créer les points de suspension sans les spécifier... La lecture se concentre sur les ressentis des personnages, laissant nos souvenirs de la piscine municipale et des Jeux Olympiques à la télévision faire la recomposition des différents univers. La subtilité narrative va jusqu'à laisser n'importe quelle fédération nationale de natation devenir l'univers décrit.


Ce livre me touche personnellement, car nous avons beaucoup échangé sur nos aspirations d'écrivains et Yvan est maintenant en tête. Il me motive et me met la pression. J'écris beaucoup, souvent sans but précis, même si j'ai des romans en cours, si je ne tiens pas mes objectifs, ils resteront à l'état de projets encore longtemps. L'excuse d'avoir eu un enfant pendant qu'il écrivait un livre ne tient pas vraiment. Son histoire transmet également un message d'accomplissement et de courage face à l'effort qui me rappelle à l'ordre.

Pour ceux qui auraient encore des doutes, je n'encense pas gratuitement, il faut que j'ai vraiment apprécié avant de sortir une éloge sérieuse comme celle-ci. Même si c'est quelqu'un que je connais et que j'apprécie, si j'avais quelque chose de négatif à dire, je l'aurais dit, mais pas nécessairement en public.



Si j'écris cet article, c'est aussi pour augmenter son référencement, car si il y a une chose qui me ralentit dans l'écriture, même si c'est un peu une excuse, c'est la difficulté de me projeter dans un rapport économique viable en tant qu'écrivain. J'y travaille chaque jour, mais sans visibilité, sans un premier best-seller payé de nos poches d'écrivains, il n'est plus possible de se faire éditer par des maisons qui feront leur vrai travail de promotion. Alors j'ai dans l'espoir de pousser une ou deux personnes à lui acheter un livre pour savoir de quoi il retourne.


Vous trouverez toutes les infos sur sa page Facebook :

https://www.facebook.com/Yvan-Finally-108663581612237/


Ce n’est pas que nous n’avons pas suffisamment de temps, c’est qu’on a tendance à le gaspiller (Paraphrase de Sénèque).

Certaines choses inestimables nous viennent gratuitement : notre corps, notre cerveau, notre santé. De ce fait, nous ne parvenons pas à leur attribuer une valeur réelle, et nous les négligeons (Atomic habits).

Nous vivons dans un monde où le but est de transformer notre temps en argent pour pouvoir satisfaire nos besoins et nos envies.

Nous mesurons notre valeur à ce que nous possédons, en échangeant une denrée hors de prix, pour 15€ l’unité. Nous n’avons pas conscience de la réelle valeur du temps que nous possédons, car nous ne savons pas quelle quantité est disponible, et parce que nous n’avons rien « payé/sacrifié » pour l’obtenir.

Nos heures sont comptées, nous ne savons pas quand notre session de jeu va expirer ; pourtant, on joue alors que chaque minute compte.

Les grands de ce monde, à la fin de leur vie, n’avaient envie que d’une seule chose : plus de temps. Plus de temps pour accomplir des choses, plus de temps avec leur famille, plus de temps pour vivre au lieu de chasser des objectifs aux desseins incertains.

Et il y a les gens normaux qui se réveillent un matin dans leur vie, sans rien, juste le droit d’aller travailler une journée de plus, produire de la valeur ajoutée qui tombe dans la poche de quelqu’un d’autre, souvent quelqu’un de mieux né avec la chance de profiter des imbrications familiales solides de gens qui ont compris il y a longtemps comment « faire de l’argent » avec le temps des autres.

On se réveille dans ce monde d’argent, cette monnaie d’échange à valeur « acceptée » par tous, cette argent générée à la sueur de notre front, au sang de nos mains… au sacrifice de notre temps disponible et incertain…

Mourir sur la route du travail, mourir au travail, pendant que notre famille vit une autre vie ailleurs, à préparer la suite, à capitaliser en savoir scolaire, manquant cruellement de notions essentielles et vitales comme « gérer le temps » et aussi « gérer l’argent ».

La société moderne française est championne en « shaming » sur le sujet de l’argent. Une personne qui en parle est forcément une personne qui en veut plus, qui veut vous vider les poches contre du savoir disponible gratuitement sur internet.

Pourtant, et comme pour la logique de ce qui est gratuit n’a pas de valeur, ce savoir disponible n’est pas suffisamment intégré, il est même oublié, éloigné par le train-train quotidien et toutes les manipulations, tous les mécanismes mis en place pour que les mortels ne remettent rien en cause, ne cherchent pas à faire valoir ce qu’ils ont de plus précieux, leur temps disponible sur Terre.

La vie c’est comme un jeu vidéo, un jeu de rôle interactif dans lequel tu as une barre de vie, une barre d’énergie, et une barre invisible, le temps de session de jeu. Cette troisième barre, on n’y a pas accès, à tout moment, elle peut arriver à la fin, on ne peut pas la recharger, on peut se faire déconnecter n’importe quand. Juste on apparaît dans le jeu à n’importe quel endroit, à n’importe quelle strate et il faut profiter de ce qui est disponible autour de nous, sans savoir pour combien de temps.

La barre de santé, elle est un peu aléatoire aussi, et la barre d’énergie, elle peut rester pleine en quelque sorte, selon la strate sociale dans laquelle on arrive.

On va pouvoir échanger l’énergie contre de l’argent, la santé aussi au final, et pouvoir avancer dans l’aventure plus ou moins rapidement, en oubliant qu’on ne sait pas si on aura suffisamment de temps pour aller jusqu’à la fin du jeu.

L’illusion, c’est qu’il y ait une fin au jeu ; tout porte à croire qu’il y a un point d’arrivée, mais la réalité, c’est qu’il n’y en a pas. Le point final de notre aventure, c’est le moment du dernier tic, peu importe quand, où et comment, c’est lui qui décidera du chemin parcouru.

Donnez dix ans à vivre à une personne, elle réussira à gaspiller les cinq premières, elle se réveillera et dira : il me reste tout ça à faire et plus que cinq années à vivre, le temps de se prendre en main, c’est déjà la fin.

Donnez une année à vivre en pleine santé à une personne, elle déconnectera du réel, voudra vivre sans compter chaque seconde qui lui reste, mais ne pourra rien faire sans l’argent nécessaire pour « payer » les activités qu’elle veut vivre.

Donnez 82 ans à vivre à un humain, il gaspillera 20 années à grandir et s’éduquer dans une structure obsolète, il travaillera 40 ans pour des entreprises qui capitalisent à outrance sur du temps de vie qu’elles achètent au prix minimum, il « profitera » 20 ans du peu de santé qu’il lui reste et s’éteindra dans l’indifférence la plus totale, regrettant de n’avoir pas su mieux faire de ce qu’il lui avait été offert.

Le système dans lequel nous vivons est vieux, triste et morne, il sert les dynasties, asservit les nouveau-nés, s’arrange pour que leurs descendances restent bien suffisamment pauvres. L’état « sauve » les gens pauvres pour qu’ils ne se rebellent pas, de peur de perdre le peu de pitance qu’on leur sert « gratuitement » et les humains se connectent à l’internet pour oublier le temps qui passe et éviter la souffrance et la désolation.

Tout ça parce que, à l’école, à la télévision, dans les magazines, dans les livres, les dogmes et les valeurs sont partagés en ce sens.

L’argent, c’est utile, mais c’est mal, il ne faut pas en parler.

La vie, c’est beau, c’est bien, faut en profiter, aimer le moment présent, lui donner toute la valeur possible, mais n’oubliez pas qu’il faudra trouver un travail et le garder pour pouvoir méditer là-dessus la seule heure de vie oisive qu’il vous restera par jour.

Le temps ? La météo, vous voulez dire ? Non ? Ah, le temps qui passe, l’horloge à ressort qu’on a mise dans notre ventre, qui va s’arrêter sans qu’on puisse savoir quand ?

Bah, faut l’oublier, vu qu’on peut rien y faire, rentrer dans un des moules présents sur la table, choisir un des trois Pokémon au début de la partie, alors qu’on pourrait très bien aller en capturer un dans les buissons juste au-dessus, si on nous donnait une Pokéball pour le faire.